Adama Keïta, joueur de Kora

Publié le par Ephedra

Adama Keïta est né au Mali en 1992. Représentant de la 72ème génération de Griots, il joue de la Kora depuis l’âge de 4 ans. Portrait d’un musicien entre tradition et modernité. 

 

 

« Les Griots étaient les yeux, la bouche et les oreilles de l’Empire Mandingue. Parce qu’il n’y avait pas d’écriture, ils étaient dépositaires de la tradition orale et de l’histoire, qu’ils transmettaient de génération en génération. » C’est ainsi qu’Adama explique le rôle et la fonction des Griots, et raconte la saga séculaire de son peuple.

 

La kora a fait son apparition au 12ème siècle au Mali. C’est un instrument construit dans une calebasse évidée recouverte d'une peau de vache, avec un trou à son sommet, pour permettre la résonnance. Les cordes, au nombre de 21, étaient auparavant en boyau ; elles sont aujourd’hui en nylon. Le manche, la traverse, le chevalet et les supports pour les mains sont faits dans un bois local, le guénou. Elle se joue face à l’instrument, en le tenant par les poignées, et en pinçant les cordes comme sur une harpe, avec les pouces et les index.

 

Chaque famille de Griots possède son instrument clanique, celui dont traditionnellement elle joue. Dans la famille d’Adama, c’est donc la kora. Les garçons sont musiciens interprètes, les filles chantent. Et la famille de ses cousins fabrique les instruments. C’est d’ailleurs elle qui a réalisé la kora actuelle d'Adama, qui le suit depuis 5 ans.

 

Adama a appris la musique avec son oncle, Toumani Diabaté, grand joueur de kora, vainqueur de deux Grammy Awards en 2006 et 2010, et collaborateur d’un récent album avec Mathieu Chedid. Le grand-père d’Adama était un joueur très connu lui aussi, au Mali.

 

Pour Adama, l’apprentissage s’est fait comme un jeu. « Je n’avais pas de Playstation ! La kora, c’était mon jouet à moi. C’était aussi, pour mon entourage, un devoir familial que de m’apprendre. Et pour moi, c’était un peu comme faire ses devoirs : quelque chose que tu fais tous les jours en rentrant de l’école. »

 

De la même façon qu’il y a huit ou neuf siècles, la transmission est toujours basée sur l’oralité. Elle se fait par imprégnation, mémorisation et reproduction.

 

En 2005, Adama intègre l’Institut National des Arts du Mali, où il produira un travail sur l’histoire de la kora, puis, en 2009, il entre au Conservatoire des Arts, où il restera 5 ans et se formera aussi à la musique écrite et occidentale.

 

Encore étudiant, il commence à se produire à l’international, notamment en Europe, avec son groupe de l’époque. Petit à petit, cependant, il envisage de poursuivre une carrière solo. La kora est en effet à elle seule un instrument complet et complexe, qui permet de faire aussi bien de l’accompagnement qu’une ligne de basse ou un i[lead]i d’impro.

 

Adama interprète un répertoire assez large, fait de compositions personnelles et de grands classiques du répertoire traditionnel.

 

Aujourd’hui, il voudrait pouvoir ouvrir son instrument à autre chose. Développer sa propre touche. Aller vers d’autres répertoires musicaux, du jazz notamment, qui se marie bien avec les sonorités de la kora.

 

Adama s’est installé à Nantes en novembre 2016. Parmi ses projets en cours, il collabore avec une chanteuse Bambara sur ses propres compositions ; il fait aussi de l’afro-jazz avec un pianiste, et reprend des classiques maliens avec un joueur de N’goni (instrument à cordes pincées, cousin de la kora).

 

Lorsqu’on lui demande ce qui lui plaît dans la kora, Adama répond que c’est un instrument apaisant, dont il apprécie la douceur. Mais surtout, il dit que la kora est pour lui plus qu’un instrument. C’est un compagnon, qui a toujours été présent, dans les hauts comme dans les bas. Il aime aussi la noblesse de son histoire et la façon dont son jeu lui a été transmis.

 

Aujourd'hui, Adama, à son tour, prend lui-même plaisir à transmettre, en donnant des cours de temps en temps. Questionné sur cette notion de la transmission par rapport à ses futurs enfants, il répond tranquillement que la question est ouverte. « Je leur apprendrai s’ils en ont envie. Si c’est leur chemin. »

 

Adama Keïta, photo personnelle

 

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